Ed. Du CTHS, 2017, coll. Format 80, 476 pages (et bibliographie).
C’est pendant la Révolution Française que les premières écoles publiques de filles virent le jour.
L’ouvrage comporte trois parties qui permettent de traverser la période de 1789 à 1830. Le souci des républicains dès 1789 était de « régénérer » les femmes, parce que sous l’Ancien Régime les identités sexuées étaient clairement distinctes, afin que chacun et chacune prenne la place qui lui est assignée dans la société.
Les revendications pour une instruction égale entre les sexes se heurtent à une opinion majoritairement partagée estimant que l’éducation a pour vocation de maintenir une division sexuée des rôles sociaux. Les filles sont intégrées dans l’école publique à partir de 1793, mais les éducateurs n’imaginent pas qu’elles puissent acquérir ensuite des capacités politiques. Cependant ces jeune-filles seront des mères républicaines et on attend d’elles qu’elles forment leurs fils à devenir de futurs citoyens libres. Cependant dès le Directoire l’enjeu de l’école républicaine est d’inculquer aux filles les normes de la féminité bourgeoise, celle de la femme au foyer. Par la suite les royalistes ont surtout pour but de faire disparaître trois figures de la féminité ; sources potentielles d’anarchie : « la fanatique », « la tricoteuse de l’An II », « la femme savante ». Après le Consulat, l’éducation est fondée sur une morale qui fige la hiérarchie entre les hommes et les femmes au sein de la famille.
Cependant des femmes de lettres résistent, elles espèrent à travers l’instruction accéder à la liberté et à l’émancipation. D’autres expériences saint-simoniennes se déroulent autour de 1830. Des femmes comme Eugénie Niboyer et Jeanne Deroin dénoncent le délaissement de l’éducation féminine. Après le vote de la loi Guizot (juin 1834-école primaire, mais ne prend pas en compte les filles), Sophie Masure adresse aux députés une pétition qui demande l’ouverture d’une école normale d’institutrices. En 1834, Suzanne Voilquin dans la Tribune des femmes fait référence aux travaux de Condorcet sur l’éducation des filles.
La mémoire conflictuelle de la Révolution continue de nourrir la génération de l’époque romantique. L’auteure montre avec finesse que bien des filles résistent pour avoir accès à la lecture, à cette porte sur l’imaginaire et qu’elles ne se résignent pas à être la gardienne du foyer assignée silencieusement aux travaux d’aiguille !
N’était-il pas dangereux d’apprendre à lire aux filles ? Les avis des hommes demeuraient partagés.
NB l’auteure montre comment était comprise l’éducation des filles dans le couple.
Guizot : la raison, plus que le savoir, est l’enjeu de l’éducation qui leur est donnée. Les jeune filles doivent apprendre à « se raisonner » pour comprendre le sens de leurs futurs devoirs domestiques et se former à l’obéissance (avec en toile de fond le Code civil marital). Dans ce cadre «la femme savante » est une figure répulsive.